Ilana RAMCHAR Economie multiple/ Références / Les impôts copyright de l'auteur

Vue globale des impôts

Il y a en 2006, 456 856  assujettis à l’ISF en France. Soit une progression de 16% en un an, selon le rapport annuel de performance de la Direction générale des impôts.

3,6 milliards d'euros récoltés en 2006
Les principales explications à ce phénomène résident dans l’augmentation des prix de l’immobilier et de la bonne santé de la Bourse. Du coup, près de 3,6 milliards d’euros ont été récoltés au titre de l’ISF en 2006, soit 20% de plus que l’année précédente. Et selon le Syndicat national unifié des impôts, le nombre de contribuables concernés devrait augmenter de 32 000 en 2007.

Bouclier fiscal peu efficace
Afin de limiter l'impact de cet impôt, le gouvernement Villepin a instauré un "bouclier fiscal" plafonnant à 60% des revenus d'un contribuable le montant de ses impôts directs. La mesure, entrée en vigueur en janvier 2007, n'a pour l'instant guère eu de succès, avait indiqué Le Figaro dans son édition du 9 mai. Alors que le gouvernement tablait sur un total de 93 000 bénéficiaires, seules 1 400 demandes avaient été déposées fin avril, dont 300 auraient été rejetées. Le nouveau président de la République, Nicolas Sarkozy, a promis d'abaisser à 50% des revenus le "bouclier fiscal" et d'y inclure les prélèvements sociaux, dont la CSG. Pas sûr que cela soit suffisant pour faire revenir les exilés fiscaux. 649 grosses fortunes avaient décidé de quitter l'Hexagone en 2005, deux fois plus qu'en 2003..



Le poids des dépenses publiques dans le PIB des pays développés sont passées (selon l'OCDE) de 26% en 1965 à 37% en 2001. Et là où la croissance des dépenses publiques est la plus forte, la croissance est aussi la plus forte.
Les politiques qui s'adressent à au moins une majorité (il y a plus de pauvres que de riches) ont donc tendance à pousser dans le sens de la redistribution ce qui contre un peu la volonté d'accaparement du capital.
La tendance côté capital est donc de rendre mercantile le plus de marchés possibles (celui des aides aux pauvres est un très grand marché) pour récupérer une partie des aides de la redistribution faite par l'état.

Le premier donne, la seconde reprend: d'un côté, l'impôt sur le revenu diminue; de l'autre, les prélèvements sociaux augmentent. Et voilà pourquoi les Français ne croient guère aux promesses fiscales

Les 10 principaux impôts payés par les ménages (milliards d'euros)

2003
TVA
109,7
CSG
64,4
IRPP
53,3
Taxe foncière
16,6

TIPPétroliers
12,1

Taxe d'habitation
10,1

Droits tabac
8,8

Droits successions
6,3

ISFortune
2,3

Droits donations
0,8






Si la baisse de l'impôt est sujette à controverse, c'est, notamment, parce qu'elle est difficile à mesurer. On a le choix entre deux méthodes. D'abord, le fameux taux de prélèvements obligatoires, devenu enjeu du débat politique, surtout pertinent sur le long terme (voir le tableau). Ensuite, le calcul, en milliards d'euros, des économies réalisées par les contribuables après une décision politique de baisse ou d'exonération. «Economiser» ne signifie pas forcément «payer moins». Exemple: les taux du barème de l'impôt sur le revenu (IR) ont baissé en moyenne de 9% depuis 2002, mais, globalement, les Français acquittent plus d'IR puisque la masse de leurs revenus a - heureusement - progressé.


Que l'on regarde un quart de siècle en arrière ou que l'on dresse le bilan fiscal de Jacques Chirac à mi-quinquennat, le constat est à peu près le même: réduction relative de la ponction de l'Etat, hausse des prélèvement sociaux. «En deux ans et demi, les impôts n'ont pas baissé. En gros, ce que vous ne payez plus en termes d'impôt sur le revenu, vous l'acquittez en CSG supplémentaire», souligne Philippe Marini, sénateur UMP de l'Oise. «Il n'y a pas de baisse, à l'exception de celle de l'impôt sur le revenu; en revanche, les droits indirects et la CSG augmentent», renchérit Didier Migaud, député socialiste de l'Isère. Que ce diagnostic soit partagé - même si Marini approuve la diminution de l'IR quand Migaud la déplore - explique l'incrédulité des Français. Voici en quoi elle est fondée.

1. Oui, l'Etat a baissé ses impôts
Ce recul concerne, essentiellement, l'impôt sur le revenu. Il a pris deux formes. D'abord, la réduction des taux du barème. Ainsi, le plus élevé est passé de 53,25 (en 2001) à 48,09% (en 2004) et le plus bas de 8,25 à 6,83%. Au total, une économie de 5 milliards d'euros pour les contribuables. Ensuite, des incitations ciblées en faveur du crédit à la consommation, des emplois à domicile, etc. Soit un gain de 900 millions d'euros. En fait, le gouvernement Raffarin a continué le travail entamé par Edouard Balladur en 1993, prolongé par Alain Juppé en 1996 et repris avec éclat par la gauche: Laurent Fabius, ministre de l'Economie, a réduit l'impôt sur le revenu de 7,3 milliards d'euros. Cette démarche semble toutefois abandonnée au sein du PS… «Nous avons diminué l'IR, mais aussi d'autres impôts, comme la TVA. Aujourd'hui, nous ne nous engageons pas sur des baisses d'impôts», affirme Didier Migaud.

 


Par ailleurs, le gouvernement Raffarin a augmenté de 410 millions d'euros la prime pour l'emploi (PPE), créée par son prédécesseur pour les salariés modestes. Elle vient en déduction de leur impôt sur le revenu, de leur CSG et de leur CRDS (contribution au remboursement de la dette sociale) ou leur est versée sous forme de prestation. Enfin, le patrimoine bénéficie d'un allégement substantiel, avec notamment la mesure Sarkozy sur les successions (exonération de droits jusqu'à 100 000 € de patrimoine).

2. Mais la Sécurité sociale ponctionne davantage
Entre 1980 et 2003, le poids de ses prélèvements et de ceux des autres organismes sociaux s'est alourdi de plus de 3 points, passant de 18,4 à 21,8% du PIB. Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin prolonge la tendance. Certes, ces hausses s'inscrivent dans des réformes d'ensemble (retraites en 2003, assurance-maladie en 2004). Mais les bienfaits de celles-ci sont à venir, les conséquences négatives de celles-là sont déjà tangibles. La hausse de la CSG représente à elle seule 2,2 milliards d'euros, répartis sur plusieurs types de contribuables: salariés, retraités imposables, épargnants et adeptes des jeux.

Par ailleurs, les fonctionnaires vont acquitter 1 milliard d'euros au titre d'une nouvelle cotisation pour leur retraite complémentaire. Au moins auront-ils un jour la satisfaction de recevoir quelque chose en retour. En revanche, les abonnés au gaz et à l'électricité trouveront saumâtre, au nom de la même réforme, cette «contribution tarifaire» qui va bientôt apparaître sur leur facture: un prélèvement obligatoire de plus! «Mais pas de hausse pour le consommateur, car cette somme figure déjà dans le prix payé, elle est simplement “extériorisée”, affirme Bernard Brun, président de l'Union française de l'électricité. Elle représentera entre 1 et 2% de la facture.» Raisonnement exclusivement valable pour 2005: au-delà, rien n'est garanti.

 


Alors, la gestion du social serait laxiste et celle de l'Etat vertueuse? C'est oublier que les décisions relèvent souvent des mêmes responsables: le gouvernement, qui accorde d'un côté la baisse de l'IR et impose de l'autre la hausse de la CSG. Et les liens financiers entre l'Etat et la Sécu sont nombreux et complexes. Seuls les régimes sociaux gérés de manière paritaire par le patronat et les syndicats, comme l'Unedic et l'Arrco-Agirc, bénéficient d'une certaine autonomie. Elle est toute relative quand, par exemple, Jean-Louis Borloo, ministre de la Cohésion sociale, décide de réintégrer les «recalculés» parmi les allocataires de l'Unedic. De toute façon, les mêmes causes produisant les mêmes effets (hausse du chômage, vieillissement de la population), les cotisations décidées par les partenaires sociaux ont aussi augmenté. Par exemple, celles versées à l'Unedic ont été relevées à deux reprises en 2002 et 2003, passant de 2 à 2,4% (part du salarié).

3. Alors, qui gagne et qui perd?
Notre tableau montre que, globalement, pour les ménages, hausses et baisses s'équilibrent. Mais chaque contribuable est un cas d'espèce. A priori, les redevables de l'IR (15,7 millions de foyers fiscaux) sont gagnants. Parmi eux, les plus hauts revenus sont les mieux lotis. C'est la logique d'un impôt progressif. «Je regrette que le gouvernement et sa majorité n'assument pas davantage ce choix, estime Philippe Marini, quand on veut encourager la créativité et le dynamisme, on ne peut pas dépasser un certain niveau de taux de taxation sur les personnes.» Selon les calculs du Syndicat national unifié des impôts (Snui), un foyer déclarant 100 000 € en a économisé 3 361 grâce aux baisses intervenues depuis 2002. Et ce gain est 17 fois supérieur à la CSG supplémentaire (environ 190 € de plus par an) qu'il acquitte sur son salaire depuis le 1er janvier. Mais ses revenus financiers supportent une ponction sociale supplémentaire de 1 point (0,7 pour la CSG et 0,3 pour la loi sur la dépendance). A l'autre bout de l'échelle, celui qui perçoit 12 000 € par an et bénéficie de la PPE est aussi gagnant: il aura économisé 510 € grâce à la montée en charge de cette prime, depuis 2002 (calculs du Snui), une somme 22 fois supérieure à la ponction supplémentaire de CSG (23 € par an). Mais lui aussi paiera plus de CSG sur son patrimoine, sauf s'il se résume à un livret A (et produits assimilés). En revanche, ceux qui n'acquittent pas l'IR et ne touchent pas la PPE - 11 millions de foyers - subissent les hausses sans compensation. Même si chacune d'elles reste modeste, leur accumulation donne un sentiment d'accablement: cotisation Unedic, essence, revenus de l'épargne, etc. Sans compter les ponctions dues à la fiscalité locale, très variables selon la géographie. Finalement, une seule augmentation peut être évitée: celle du tabac. Il suffit… d'arrêter de fumer! Entre 2002 et 2004, le prix du paquet de 20 cigarettes est passé de 3,60 à 5 €. Jusqu'en 2003, une hausse de 1 € générait 80 centimes de recettes supplémentaires. Depuis janvier 2004, une augmentation ne rapporte plus rien du tout: les prix ont atteint un tel niveau que les consommateurs renoncent au tabac (c'était le but recherché) ou recourent à la contrebande (ce qui l'était moins).





4. A qui profite la baisse des charges sociales?
Elles ont reculé de 5 milliards d'euros depuis 2002. En termes comptables, cette somme a bénéficié aux entreprises qui ont réduit d'autant leurs versements à l'Urssaf. Le gouvernement affirme que cet argent profite, en réalité, aux ménages: parce que ces baisses de charges ont été calibrées de manière à compenser la hausse du salaire minimum décidée dans le cadre de l'harmonisation des différents Smic issus de la loi sur les 35 heures. Ces 5 milliards ayant permis une progression du pouvoir d'achat, ils s'analysent, en termes économiques, comme un avantage pour les salariés concernés et non pour leurs employeurs.

L'argument est juste, mais ce gain sur les fiches de paie, s'il est financé sur fonds publics, ne doit rien à une réduction d'impôts. Et quand le relèvement volontariste du Smic aura été absorbé par les entreprises (le dernier volet, 5,5%, est prévu pour le 1er juillet 2005), la baisse des charges continuera de s'appliquer. Elle devrait même être amplifiée, puisque Jacques Chirac a demandé - vœux aux forces vives, le 4 janvier - que toutes les cotisations patronales qui frappent le Smic disparaissent d'ici à trois ans. Pour éviter une «trappe à bas salaires» - les employeurs maintiendraient leurs salariés au Smic - les rémunérations un peu supérieures à ce minimum seraient aussi concernées.

5. La baisse de l'impôt sur le revenu peut-elle se poursuivre?
Jacques Chirac a annoncé sa reprise (après une interruption dans le budget 2005). Hervé Gaymard, ministre de l'Economie, l'a chiffrée (Europe 1, le 9 janvier), estimant que le respect de la promesse présidentielle - réduction de 30% entre 2002 et 2007 - était «réalisable». Il reste 21% à effectuer, ce qui suppose d'y consacrer 10 milliards d'euros étalés sur deux années, 2006 et 2007, soit 5 milliards d'euros par an. Or l'addition pour 2006 est déjà très lourde: de 1 à 6 milliards d'euros pour faire disparaître les charges sociales au niveau du Smic et autour; 4,3 milliards pour honorer des mesures déjà votées (budget 2004, 2005, etc.); 2 milliards d'euros supplémentaires si nos partenaires européens acceptent la baisse de la TVA (de 19,6 à 5,5%) dans la restauration (on le saura au cours du second semestre 2005). Voilà une grosse douzaine de milliards d'euros à trouver pour la seule année 2006. Avec une autre contrainte: dénicher 7,7 milliards d'euros pour remplacer la soulte versée par EDF, une recette exceptionnelle qui a permis de réduire les déficits publics pour 2005. Un exploit herculéen si, comme l'a promis Jean-François Copé (Le Grand Rendez-vous d'Europe 1, le 30 janvier), «la baisse des impôts, c'est une dépense comme une autre, elle sera gagée sur des économies». Ce que conseille d'ailleurs vivement Nicolas Sarkozy, président de l'UMP. Aussi Copé se refuse-t-il à annoncer tout objectif chiffré. Si baisse il y a en 2006, elle risque donc d'être symbolique, de l'ordre de 1%, soit 500 millions de mieux pour les contribuables.

6. La hausse des prélèvements sociaux va-t-elle continuer?
Oui. Une hausse des cotisations d'assurance-vieillesse inscrite dans la réforme des retraites est déjà prévue pour 2006: 0,2% de plus, soit 750 millions d'euros (dont la moitié à la charge des salariés). Le plus lourd est à venir: la loi Fillon du 21 août 2003 ne finance que le tiers des 15 milliards prévisibles de déficit du régime de retraite des salariés. Les 10 milliards manquants proviendront d'une nouvelle hausse des cotisations. Selon un scénario vertueux, elle serait compensée par une baisse équivalente des prélèvements Unedic, grâce au recul du chômage. Cet espoir - fondé sur le raisonnement démographique - n'a plus que trois ans pour se concrétiser: c'est en 2008 qu'il faudra, au vu de prévisions économiques révisées, prendre une décision sur les 10 milliards. Enfin, la réforme de l'assurance-maladie comporte, outre la hausse de la CSG, un maintien de la CRDS au-delà de 2014 (sa date d'extinction prévue) et pour une durée non déterminée. Ce prélèvement «provisoire» créé par Alain Juppé en 1996 et déjà prolongé par son successeur à Matignon, Lionel Jospin, semble avoir la vie longue. Les Anglais n'ont pas tout à fait tort quand ils disent que rien ne dure éternellement sauf la mort et les impôts!

l'express 9-2-2005

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